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mercredi 18 mai 2016

18 mai 1944 : déportation des Tatars de Crimée


Le 18 mai 1944, les troupes du NKVD (Народный комиссариат внутренних дел = Commissariat du peuple aux Affaires intérieures), la police secrète soviétique, ont commencé à déporter les Tatars de Crimée de leur patrie.

Drapeau des Tatars de Crimée

Selon les données officielles, 183 155 personnes ont été déportées. Comme à l’habitude, les autorités soviétiques ont laissé peu de temps pour que les gens puissent rassembler leurs biens. Des milliers ont été parqués dans des wagons comme du bétail. Beaucoup de personnes âgées qui ne pouvaient pas marcher ou se tenir debout ont été abattues sur place. La majorité des Tatars de Crimée ont été envoyés en Ouzbékistan, de petits groupes ont été déportés au Kazakhstan, au Tadjikistan et en Russie. On estime que 46% des Tatars de Crimée sont mort lors de la déportation, soit de faim pendant le voyage ou dans les premiers mois d'exil.

Le dictateur soviétique Joseph Staline déporta les Tatars après les avoir accusés de collaboration avec les nazis. Les autorités soviétiques décidèrent de cette punition collective en argumentant qu'un certain nombre de Tatars de Crimée avaient fait défection de l'armée rouge et avaient lutté contre les partisans soviétiques. Toutefois, des documents officiels ont montré que la plupart des Tatars de Crimée, qui avaient collaboré avec les forces nazies, avaient été évacués vers l'Allemagne plusieurs semaines avant le début de la déportation.

Tatars attendant d'être déportés

La déportation a même concerné des Tatars anciens combattants. Au total, plus de 250 officiers ont été expulsés de leur patrie; beaucoup d'entre eux avaient récompensés par les autorités soviétiques pour leur courage ! Amet-Khan Sultan, un pilote Tatar qui avait la distinction suprême de héros de l'Union soviétique n'a pas été expulsé, mais a été interdit de séjour en Crimée.

En juin 1944, les Arméniens, les Grecs et les Bulgares ont été à leur tour déportés de Crimée. Jusqu'en 1948, plus de 80% des colonies de Crimée, qui avaient l'origine tatare, ont été renommés.

Un grand nombre de ces déportés sont morts de faim et de maladie au cours de l'hiver 1944-1945. Après la mort de Staline, ils n’ont pas été amnistiés par Beria en 1953. Et jusqu'en 1956, ils avaient un statut de colons spéciaux, sans avoir le droit de quitter leur maison, étant sous contrainte pénale.

Contrairement à d'autres peuples déportés, qui sont retournés dans leur pays natal à la fin des années 50, les Tatars de Crimée n’ont officiellement reçu un tel droit qu'en 1974. C’est seulement en 1989, soit quelque 36 ans après la mort de Staline, que les autorités soviétiques reconnurent la déportation des Tatars de Crimée.

En 2013, un an avant l'annexion de la Russie de la péninsule de la mer Noire, plus de 260.000 Tatars de Crimée vivaient dans la péninsule. Près de 150 000 vivent en Ouzbékistan, un demi-million en Turquie, et des dizaines de milliers en Bulgarie et en Roumanie.

Moustafa Djemilev, chef du Mouvement National des Tatars de Crimée,
interdit de séjour dans son propre pays !

Depuis l’occupation et l’annexion de la Crimée par la Russie en mars 2014, au mépris des lois internationales, les Tatars de Crimée sont régulièrement soumis à des fouilles arbitraires, des livres sont saisis et les autorités d’occupation ont fermé un certain nombre de médias Tatars en Crimée.  Le 26 avril 2016, le Mejlis, organe représentatif légal des Tatars était classé comme « organisation extrémiste » par la Russie.


Dans ce contexte, la victoire sous le drapeau ukrainien de la chanteuse Tatare de Crimée Djamala au Grand Prix Eurovision de la chanson, samedi dernier, quatre jours avant cet anniversaire, a pris un relief particulier. Elle a rappelé que, contrairement à la doxa en vogue au Kremlin, la Crimée est avant tout une terre peuplée depuis toujours de Tatars et non pas de Russe, le Khanat de Crimée et sa capitale Bakhtchissaraï ayant été établis en 1441.




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