Pages vues le mois dernier

dimanche 30 septembre 2012

A Strasbourg, pour le général comte Pacas



Vendredi 28 et Samedi 29 Septembre, j’étais à Strasbourg. Le but premier de ce déplacement était d’évoquer le général comte lituanien Liudvikas Mykolas Pacas (en polonais Ludwik Michal Pac) au cours de l’Assemblée Générale de l’association Alsace – Lituanie. J’ai en effet écrit un article sur son destin étonnant pour les prochains « Cahiers Lituaniens » édités en principe annuellement par l’association.

Le général Pacas (Bibliothèque Polonaise de Paris)

Pour savoir en quoi ce destin fut étonnant, il faudra lire les « Cahiers Lituaniens ». Je dirai brièvement qu’il a participé à la majeure partie des campagnes napoléoniennes entre 1806 et 1814, et c’est même lui qui a conduit la dernière charge de cavalerie de la défense de Paris, le 30 Mars 1814, général de division à la tête de 4 escadrons. Il aura également un rôle très actif lors de l’insurrection de 1830 – 1831 à Varsovie.

Mais pourquoi à Strasbourg ? Le point de départ de la recherche a été l’inscription « Pac – 1780 » sur une des plaques qui, sur la façade du mess des officiers de Strasbourg, recense les « généraux strasbourgeois » depuis le XVIIe siècle jusqu’en 1874. Or, il s’avère que, dans la mesure où l’acte de naissance du général Pacas est introuvable depuis longtemps, il pourrait très bien être né ailleurs qu’à Strasbourg (par exemple à Lingolsheim) et que, s’il a bien été baptisé a priori le 19 Mai 1780, il serait plutôt né en 1778 ! Voilà de quoi occuper les historiens !

La plaque où apparait le nom "Pac - 1780"


L’intérêt pour moi était en outre que je n’étais pas venu à Strasbourg depuis au moins 20 ans (mais plus vraisemblablement 30 !!). J’ai revu avec plaisir les monuments historiques « classiques », j’ai découvert le quartier « européen » (Parlement européen, Cour européenne des droits de l’homme, siège du Conseil de l’Europe) et j’ai pu flâner dans le centre-ville semi-piétonnier, profitant d’une météo estivale.

La Maison Kammerzell, restaurant très célèbre sur la place de la cathédrale





mercredi 26 septembre 2012

Poutine s’en va-t-en guerre ?



Une fois n’est pas coutume : je vais sortir de ma zone de prédilection (qui s’étend quand même de Tallinn à Yalta !) pour vous emmener jusque dans le Caucase.

Retour quatre ans en arrière.

En Avril 2008, la Russie avait remporté une victoire tactique au sommet de l’OTAN à Bucarest, où, sous l’influence de la France et de l’Allemagne, ni l’Ukraine ni la Géorgie n’obtinrent le MAP (Plan d’action pour l’adhésion). La France expliquait son refus par la nécessité de respecter l’équilibre européen, en clair, de ménager la Russie.

Dans la nuit du 7 au 8 Août 2008, l’armée géorgienne bombarde la « capitale » sud-ossète Tskhinvali, débutant une offensive pour essayer de reprendre par la force le contrôle de sa région séparatiste d’Ossétie du sud. Tbilissi réagissait à une longue période d’escalade et de provocations, accentuée pendant l’été, de la part de la Russie. (NB : Si la Russie et ses affidés soulignent la première partie de la phrase du rapport de la commission Heidi Tagliavini : « C'est la Géorgie qui a déclenché la guerre contre la Russie lorsqu'elle a bombardé Tskhinvali, la capitale de l'Ossétie du Sud, dans la nuit du 7 au 8 août 2008 », elle « oublie » de mentionner la suite : « Toutes les parties, géorgienne, russe, abkhaze et ossète du sud, ont leur part de responsabilité. La Russie avait mise en place une véritable politique de l'escalade qui a mené à la guerre. Le contexte a mis la Géorgie dans une situation où elle ne pouvait pas agir autrement ». Pour consulter le rapport en Anglais (3 volumes) : http://www.ceiig.ch/pdf/IIFFMCG_Volume_I.pdf).


Le 8 Août matin, appliquant un plan militaire approuvé en 2006 (fait récemment reconnu par le Président russe Vladimir Poutine), la Russie faisait pénétrer en Géorgie, par le tunnel de Roki, 5 bataillons de la 19e Division de Fusiliers motorisés appartenant à la 58ème Armée, normalement stationnée en Tchétchénie, mais qui sortait à peine de l’exercice « Caucase 2008 » ( Kavkaz-2008, du 16 Juillet au 2 Août 2008).  


La Russie justifia notamment son intervention par le fait qu’elle avait, selon elle, toute légitimité à protéger « ses » citoyens attaqués à l’étranger (les Sud-ossètes comme les Abkhazes avaient été massivement naturalisés russes, bénéficiant d’une stratégie de « passeportisation » les plaçant sous la protection de la Fédération de Russie).

Le 14 Août 2008, Moscou et Tbilissi acceptèrent de signer un accord de cessation des hostilités, proposé par la France qui assure alors la présidence de l’Union européenne. Mais, alors que l’accord prévoyait le retour des forces russes sur leurs positions ante bellum, il est notoire que la Russie ne respecte pas celui-ci, entre 10 000 et 20 000 soldats russes étant encore stationnés en Abkhazie et en Ossétie du sud. En outre, Moscou bloque le déploiement de missions d’observation de l’ONU ou de l’OSCE, et la mission de surveillance européenne (EUMM) est interdite de pénétrer en territoire sud-ossète.


Or, 4 ans plus tard, l’exercice « Caucase 2012 » vient de se dérouler du 17 au 23 Septembre et a engagé 8 000 soldats, 200 véhicules de combat et près de 100 pièces d’artillerie. Notamment, des tirs réels de missiles tactiques Totchka-U (SS 21 Scarab, d’une portée de 120 km) et Iskander (SS 26 Stone, portée maximum 500 km), ainsi que de lance-roquettes multiples Smerch (12 roquettes en 38 secondes jusqu’à 90 km) ont été effectué au cours de l’exercice.   

Ce qui rend nerveux les Géorgiens, outre le précédent de 2008, c’est que cet exercice a lieu juste avant les élections législatives du 1er Octobre 2012. Finir le travail de 2008, à savoir la conquête militaire du reste de la Géorgie par la Russie n’est pas à exclure. Mais il est plus vraisemblable qu’il s’agisse surtout d’un moyen de pression pour installer à la tête de la Géorgie une marionnette au service du Kremlin, en l’occurrence le multimilliardaire Bidzina Ivanishvili, qui a créé la coalition « Le rêve géorgien ». Ce mouvement, financé par la Russie, et accusé d’acheter les voix, ratisse large, des nostalgiques de l’URSS aux nationalistes les plus véhéments, et est prêt à descendre dans la rue pour obtenir par la violence ce qu’il n’aurait pas pu avoir dans les urnes.

Bidzina Ivanishvili

Autant le résultat des élections législatives bélarusse de dimanche dernier ne faisait aucun doute, autant celui des élections en Géorgie mérite qu’on s’y attache.
  
Tir de batterie de Smerch



mardi 25 septembre 2012

Quels touristes viennent en Lituanie ?



Les statistiques mettent parfois « un certain temps » à être diffusées. Ce n’est par exemple que ce 24 Septembre 2012 que le Département Lituanien du Tourisme a publié celles portant sur l’année 2011, via diena.lt. Dans le même temps, « Statistics Lithuania » publiait déjà quelques statistiques portant sur le 2ème trimestre (http://www.stat.gov.lt/lt/news/view/?id=10419) et sur la première moitié de 2012…… Essayons d’y voir un peu plus clair.


En 2011, la Lituanie a été visitée par 1 775 000 touristes, ce qui constitue une hausse de 18 % par rapport à 2010. 44 % de ces touristes sont venus en voiture, 34 % en avion. Ils sont restés en moyenne 4 jours en Lituanie.

Sur 10 touristes, 2 venaient du Bélarus, 2 de Russie, 1 de Pologne, 1 de Lettonie et 1 d’Allemagne.


Au cours du premier semestre 2012, 338 453 touristes étrangers ont séjournés dans les hôtels et chambres d’hôtes lituaniens (excluant donc les séjours en famille), y passant 669 894 nuitées. Ces touristes provenaient des pays suivants :

   # Russie (38 592)
   # Pologne (32 503)
   # Bélarus (30 429)
   # Allemagne (25 823)
   # Lettonie (14 174)
   # Grande-Bretagne (10 754)
   # Italie (9 036)
   # Estonie (8 590)
   # Etats-Unis (8 367)
   # Finlande (7 896)
   # France (7 468)
   # Norvège (7 022)

Seul le nombre de touristes en provenance de Pologne (- 15,6 %), d’Estonie et des Etats-Unis est en baisse par rapport au 1er semestre 2011.



Enfin, au cours du 2ème trimestre 2012, les Lituaniens se sont rendus à l’étranger dans les pays suivants :

   # Lettonie 16,8 %
   # Grande-Bretagne 11,3 %
   # Pologne 10,6 %
   # Turquie 7,0 %
   # Bélarus 6,8 %
   # Allemagne 6,8 %

On rappellera que, depuis le 1er Janvier 2012, la Lituanie a fermé tous ses offices du tourisme à l’étranger.  


   

lundi 24 septembre 2012

Lukashenka et la multiplication des votes



En France, on a l’habitude du comptage des participants aux manifestations : 5 000 selon la police, 150 000 selon les syndicats. Le Bélarus vient de l’appliquer pour la participation aux « élections législatives » de ce week-end : 74,3 % pour la Commission Electorale Centrale, 38,7 % pour l’opposition !


Il semblerait toutefois que le Président Lukashenka, à l’instar de Jésus multipliant les pains, ait trouvé le moyen de faire des miracles en multipliant les votes.

Prenez l’exemple du bureau de vote n° 367 à Minsk (cité par charter97.org). Des observateurs de l’opposition étaient en place depuis le début des opérations de vote (8H). A 11H, ils avaient compté 70 votants. Lorsque des observateurs de l’OSCE sont venus à 11H demander les chiffres officiels, les membres de la commission leur ont annoncé 691 votants dont 418 ayant voté par anticipation. Différentiel : 273. Au lieu de 70. Miracle !

En fait, la recette du miracle est simple :

   # Prenez une Commission Electorale Centrale dont la Présidente, Lidya Yermochina, a une expérience sans faille des miracles depuis 16 ans ;

Lidya Yermochina

   # Désignez à tous les niveaux des commissions électorales dont les membres vont sont dévoués ;

   # Pendant la période pré-électorale, invalidez, harcelez et même emprisonnez vos opposants ; l’idéal est qu’il n’y ait qu’un seul candidat (le vôtre bien sûr) par circonscription. Si, devant tant d’avanies, les opposants appellent au boycott, c’est tout bénéfice pour vous car ……

   #  Mobilisez vos « ressources administratives » telles que :
Ø  Le vote par anticipation qui permet de vérifier l’adage selon lequel les urnes ont tendance à se remplir toutes seules la nuit. Pour encourager le vote par anticipation, précisez, dans les usines ou les fermes collectives, que le salaire sera versé dès que l’ouvrier aura voté (NB : ça marche aussi, sous d’autres prétextes, avec les étudiants et les militaires)   
Ø  L’organisation du transport de vos votants. D’un bureau de vote à l’autre s’entend. L’opposition appelle méchamment ça des « carrousels ». Comme vous avez pris la précaution d’avoir des commissions électorales dévouées à votre cause (voir ci-dessus), celles-ci seront tellement occupées à choyer les électeurs (vodka, zakouski) qu’elles en oublieront de tamponner les passeports, ce qui indiquerait que le votant potentiel a déjà voté ailleurs.
Ø  Si des observateurs protestent – sans fondement bien sûr – faites-les expulser du bureau de vote, voire embarquer par la police.   

   # Faites validez les résultats par les observateurs internationaux (ceux de la CEI bien sûr), qui trouveront ces élections honnêtes et transparentes et conformes aux normes internationales (comprendre : celles en vigueur en Russie ?). Si des observateurs de l’OSCE sont susceptibles d’être trop critiques (Marieluise Beck, Emanuelis Zingeris), il suffit de ne pas leur donner de visa afin qu’ils ne puissent pas entrer au Bélarus.

Si vous réussissez à réunir tous ces ingrédients, le miracle se renouvellera pendant au moins 18 ans, et vous recevrez le titre envié de « dernier dictateur en Europe » !

Luka et Kolya


Je vois d’ici certains commentaires qui me diront qu’il est heureux qu’un village gaulois slave résiste encore à la dictature de l’UE et de l’OTAN. Qu’ils aillent, comme je l’ai fait, passer la frontière bélarusse seul non russophone dans un bus de ligne (bilan : le scan de tout mon passeport, certainement à l’usage du KGB), ou assister à l’investiture du camarade Lukashenka (en 2006 : le centre ville interdit et un policier, en civil ou en tenue, tous les 5 mètres), et on en reparle.

samedi 22 septembre 2012

Bataille de Saulė et journée de l’unité balte



Les Chevaliers Porte-Glaive avaient été créés en 1202 à Dünamünde (aujourd’hui Daugavgrīva, un quartier de Riga) par l’évêque Albert von Buxhoeveden, afin d’assurer la défense de la colonie germanique arrivée dès 1099 par la Daugava. Chargés incidemment de christianiser les populations baltes, les Porte-Glaive avaient soumis la Livonie et l’Estonie dès 1223.

De son côté l’Ordre Teutonique, fondé à Saint-Jean d’Acre en tant que communauté religieuse charitable, est reconnu comme ordre militaire par la Pape Innocent III en 1198. En 1226, Conrad de Mazovie appelle les Chevaliers Teutoniques pour qu’ils protègent ses terres contre les incursions des tribus prussiennes païennes. En 1231, les Teutoniques commencent leur guerre contre les Vieux-Prussiens.


Le 19 Février 1236, le Pape Grégoire IX publia une bulle papale déclarant la croisade contre la Lituanie. Son but était de conquérir les terres le long de la Baltique afin d’unir les possessions des Porte-Glaive et des Teutoniques. Les Porte-Glaive auraient préférer s’enfoncer dans les terres le long de la Daugava et traînent un peu des pieds pour aller effectuer un rraid en Samogitie en compagnie de chevaliers du Holstein, de troupes de la République de Pskov, de Livoniens, de Latgalliens et d’Estoniens. Le raid, suivi de pillage, se déroule bien mais, suivant les habitudes de l’époque, il n’est pas suivi d’une occupation.

C’est en se retirant que les Porte-Glaive tombent sur un groupe de Samogitiens qui les empêchent de traverser la rivière Mūša (rivière du nord de la Lituanie qui se jette dans la Mėmele à Bauska en Lettonie pour former la Lielupe). Le lendemain matin, alors que les Chevaliers lourdement armés pataugeaient dans les marais, le Duc samogitien Vykintas, qui avait eu le temps de ramener des renforts (en tout 4 à 5 000 hommes), fit un véritable massacre, les troupes samogitiennes, plus légèrement armées, étant plus mobiles. En outre, les alliés locaux des Porte Glaive se débandèrent, notamment quand le Maître Volkwin fut tué. Enfin, les chevaliers qui s’enfuyaient en direction de Riga furent tués par les Semigalliens. 

Le duc Vykintas
   
Cette défaite fut importante dans la mesure où elle obligea l’Ordre des Porte Glaive à fusionner en 1237 avec l’Ordre Teutonique, bien que demeurant une branche autonome de celui-ci sous le nom de Chevaliers Livoniens. Mais surtout, cette victoire des Samogitiens (Lituaniens) et Semigalliens (Lettons) donna des idées aux autres  peuples « Lettons » (Curoniens, Seloniens, Oeseliens) qui se révoltèrent à leur tour contre l’Ordre Livonien.


C’est la raison pour laquelle, en 2000, les Parlements letton et lituanien prirent la décision de faire du 22 Septembre la Journée de l’Unité des Baltes (On se rappellera que les Estoniens sont des Finno-Ougriens et que les deux seules nations baltes sont la Lettonie et la Lituanie). Cet après-midi, les autorités lettones et lituaniennes se retrouvent à Bauska pour célébrer cette journée (cf. http://www.latlit.eu/eng/news/celebrating_the_programmes_ann). Cet après-midi également, un pique-nique balte réunit Lituaniens et Lettons de Paris, auxquels ont été associés Estoniens et « assimilés », au Parc des Buttes Chaumont.   


jeudi 20 septembre 2012

23 Septembre 2012 : « élections législatives » au Bélarus



L’intérêt avec les dictatures, c’est qu’il n’est pas besoin de veiller tard dans la nuit pour connaître le résultat des élections. Les « élections » du 23 Septembre prochain pour renouveler les 110 membres de la Chambre des représentants du Bélarus devraient confirmer cette règle.

Le Parlement bélarusse est bicaméral : le Conseil de la République, chambre haute de 64 membres (56 élus par les Conseils régionaux et 8 nommés par le Président pour 4 ans), représentant les territoires, et la Chambre des Représentants, chambre basse de 110 membres, élus au suffrage populaire eux aussi pour 4 ans. Sur les 110 membres élus en 2008, 103 se déclarent indépendants, 6 sont affiliés au Parti communiste (Камуністы́чная па́ртыя Белару́сі) et le dernier au Parti agrarien (Агра́рная па́ртыя Беларусі). Ces deux derniers partis soutenant le Président Alyaksandr Ryhoravich Lukashenka  (Аляксандр Рыгоравіч Лукашэнка), autant dire que l’opposition n’a pas droit de cité ! En tout état de cause, le Parlement bélarusse n’a quasiment aucun pouvoir, se contentant d’enregistrer et valider les propositions de loi provenant toutes du Président de la République.

Alyaksandr Ryhoravich Lukashenka

Lors de l’ « élection présidentielle » du 19 Décembre 2010, 700 personnes, sur les milliers qui avaient manifesté contre la falsification du scrutin, avaient été arrêtée, dont 7 des 9 candidats opposés à Lukashenka. Au moins 13 sont encore en prison.  

Ces « élections législatives » ne se présentes pas sous de meilleurs auspices. L’opposant le plus emblématique, qui avait reçu en 2006 le Prix Sakharov, Alexandre Milinkevitch, a été empêché de se présenter. L’intimidation, le harcèlement, la détention des activistes de l’opposition et des journalistes indépendants sont récurrents. Le 6 Janvier 2012, le pouvoir a créé un Centre Opérationnel Analytique destiné à renforcer le contrôle sur Internet. Seuls 3,5 % des membres des Commissions Electorales de Districts représentent l’opposition. Le 15 Septembre, deux des principaux partis d’opposition, le Parti de l’Union Civique et le Front Populaire Bélarusse, ont décidé de retirer leurs candidats, mais le sujet divise l’opposition. Leur visa n’est pas été accordé à certains des observateurs de l’OSCE (comme hier à Emanuelis Zingeris, Président de la Commission des Affaires Etrangères au Parlement lituanien), ce qui les empêche bien évidemment de pouvoir venir observer.

Emanuelis Zingeris

Donc, rien n’a changé au pays d’Alyaksandr « Ubu » Lukashenka, « un cirque derrière les barbelés ».   
  
Certains, qui sont allés au Bélarus, ont trouvé la vie des habitants tout à fait normale (le mot est à la mode ….). Ce ne fut pas mon analyse lors de mes deux séjours. Il faut dire que le premier, en Avril 2006, est tombé en même temps que la cérémonie d’investiture de Lukashenka et que la densité de policiers, en tenue et en civils, donnait au centre ville de Minsk un aspect surréaliste. Quant au deuxième voyage (Avril 2012), le long examen et le scan de mon passeport (de la 1ère à la 36ème page) à la frontière par la policière de service ne m’a pas semblé mériter le qualificatif de « normal »……   

Alyaksandr Lukashenka et son fils illégitime, Kolya

lundi 17 septembre 2012

Retour sur les Journées du Patrimoine à Saint-Patrice

Dorothée de Courlande nous accueillait


Comme prévu, je me suis rendu hier au château de Rochecotte, à Saint-Patrice (à 7 km de chez moi), pour participer au temps fort des Journées du Patrimoine locales.

Autour de la personnalité de Dorothée de Courlande, duchesse de Dino, qui avait séjourné au château de 1828 à 1847, avant que celui-ci ne passe à sa fille, Pauline de Talleyrand-Périgord, avaient lieu une exposition et deux conférences. Une des conférences a été prononcée par Mme Suzanne Champonnois, Maître de conférences à l’INALCO, qui a eu la bonté de me dire qu’elle suivait mon blog avec intérêt.

Mme Suzanne Champonnois

J’ai été agréablement surpris du nombre et de la qualité des participants à cet événement pour un village de moins de 700 habitants. Qualité, car les commentaires entendu au cours des conférences ou lors des pauses laissent à penser qu’il y avait là des spécialistes.

Dans l’exposition, dont la plupart des gravures ne m’étaient pas inconnues, j’ai remarqué une carte scolaire de l’URSS, de l’époque de ma jeunesse. Comme le temps passe vite ……



La pause ménagée entre les deux conférences a parmi de visiter le parc, le château et la chapelle de Rochecotte, aujourd’hui transformé en hôtel de luxe. C’est d’ailleurs tout l’intérêt des Journées du Patrimoine que de permettre de visiter des lieux historiques privés, fermés habituellement au commun des mortels. Lors des conversations en aparté, certains regrettaient d’ailleurs que tous les propriétaires ne jouent pas le jeu car, estimions-nous, deux jours par an ne doit pas être une charge énorme.

Merci donc à la Municipalité de Saint-Patrice qui a su faire de ces journées un événement. http://www.annuaire-mairie.fr/mairie-saint-patrice.html  


dimanche 16 septembre 2012

Quand le Duché de Courlande vendait des navires à Louis XIV



Dans un post précédent (http://gillesenlettonie.blogspot.fr/2012/08/31-aout-1559-la-courlande-devient.html), nous avions vu que nous pouvions dater le début de l’existence du Duché de Courlande du 28 Novembre 1561 quand Gotthard Kettler, ci-devant Maître de l’Ordre Livonien, qui avait été auparavant sécularisé, signa le « Pacta Subjectionis » par lequel il faisait allégeance au Roi de Pologne – Grand-duc de Lituanie.

Le duc Jacob / Jekabs

Mais, de facto, le Duché de Courlande allait être un Etat souverain. Il atteint son apogée sous le règne du Duc Jekabs fon Ketlers (Jacob ou Jacques Kettler).

Jacob naît le 28 Octobre 1610 à Goldingen (aujourd’hui Kuldīga). Son père Guillaume (1574 – 1640), duc de Courlande, qui entretient de mauvaises relations avec les barons baltes, est déposé en 1616 au profit de son oncle Frédéric (1569 – 1642), duc de Sémigalle, lequel réunit les deux duchés sous son nom. Frédéric étant sans postérité, Jacob/Jekabs est nommé régent dès 1638 et devient duc de Courlande – Sémigalle au décès de son oncle, le 16 Août 1642. 
  
Dès la période de sa régence, le duc Jacob avait commencé à créer des chantiers navals, à Windau (Ventspils) et Libau (Liepāja). A partir de 1643, les bateaux, aussi bien de guerre que de commerce, y furent construits en série. Pendant le règne de Jacob, ce sont 135 navires qui vont sortir des chantiers courlandais, principalement entre 1643 et 1658.

Le château de l'Ordre livonien à Ventspils


Or, pendant cette période, l’Europe est en pleine guerre de Trente Ans (1618 – 1648), véritable guerre civile européenne. Le duc de Courlande y trouve l’opportunité de vendre une grande quantité de fusils, de canons et de poudre aux belligérants. La France, engagées parallèlement dans une guerre contre l’Espagne avait alors un grand besoin de bateaux. La Courlande lui en vendit 24.

Il faut dire que, dès 1643, le duc Jacob avait envoyé en France George Fircks pour négocier un traité commercial. Fircks raconta par la suite qu’il avait dû verser des pots-de-vin au Cardinal Mazarin (Premier Ministre : 3 500 florins de bijoux), aux ministres (3 000 florins de bijoux au comte de Brienne, Ministre des Affaires Etrangères) et aux membres de la famille royale. Mais le traité commercial fut signé le 30 Décembre 1643. Des agents consulaires et diplomatiques courlandais furent installés à La Rochelle, Bordeaux, Nantes et Marseille.  

Le drapeau naval du Duché de Courlande

Par ailleurs, les moyens créant le besoin (le Duché eut jusqu’à 60 gros navires, employant 2 à 3 000 marins), le duc Jacob, ayant des bateaux, se lança dans le trafic des esclaves à grande échelle entre l’Afrique et les Caraïbes. Il voulut alors se doter de colonies. Tobago fut colonisée en 1642 (baptisée alors Nouvelle-Courlande), abandonnée en 1650 en raison du massacre de colons par les Amérindiens, puis reconquise en 1654 et la ville de Jekaba pilseta (devenue aujourd’hui Jamestown) construite. Par ailleurs, en 1651, trois forts furent construits sur l’île James, dans l’embouchure du fleuve Gambie, où les Courlandais furent les premiers Européens à s’installer. En 1659, la Courlande perd toutes ses colonies au profit des Hollandais. Mais, pendant quelques années, elle fut le plus petit Etat colonial européen. 

L'île James
   
A cet apogée commercial et colonial, on ajoutera un apogée social. Le comte de Brienne, alors qu’il n’était pas encore Ministre des Affaires Etrangères, de passage à la Cour ducale de Mitau (aujourd’hui Jelgava), où il reçut un présent en ambre, témoignera : « Il n’y a pas de meilleure Cour en Europe, et il m’a semblé être en France ».  

Le duc Jacob décédera le 1er Janvier 1682 à Mitau, sa capitale. Son fils Frédéric II Casimir lui succédera de 1682 à 1698. Le Duché de Courlande et Sémigalle sera rayé de la carte par la volonté de la Tsarine Catherine II en 1795.

Source bibliographique principale : « The reign of Duke James in Courland – 1638-1682 » d’Alexander V. Berkis, 1960

samedi 15 septembre 2012

Début de la campagne électorale pour les législatives lituaniennes



Hier 14 Septembre a débuté officiellement la campagne électorale pour les élections législatives lituaniennes qui auront lieu les 14 (1er tour) et 28 Octobre (2ème tour). Les bureaux de vote seront ouverts de 7H à 20H.

Le coup d’envoi de cette campagne est traditionnellement donné par un tirage au sort qui a eu lieu mardi dernier et qui, apparemment, a une grande importance aux yeux des partis politiques : l’attribution d’un numéro d’ordre, que l’on retrouve par la suite sur la propagande électorale. (http://www.vrk.lt/lt/naujienos/del-kandidatu-sarasu-dalyvaujanciu-2012-m-seimo-rinkimuose-rinkimu-numeriu.html)

Cette année, 17 partis politiques et une coalition de 4 partis sont en lice pour le scrutin, sur un total de 41 partis politiques enregistrés (pour une population estimée début Septembre à 3,180 millions d’habitants) ! Le nombre total de candidats est de 1950, ce qui est 400 de plus qu’il y a 4 ans. Seuls 8 partis présentent le maximum possible de candidats, 141, correspondant aux 141 sièges à pourvoir au Seimas (Parlement).

Sur les 141 sièges, 71 sont pourvus par un scrutin majoritaire de circonscription, dans (c’est une tautologie) 71 circonscriptions, comme on le connaît en France. Les 70 autres sont pourvus au scrutin proportionnel, pour autant que le parti obtienne au moins 5 % des voix des votants (7 % pour une coalition de partis).

La liste exhaustive des candidats, telle que donnée par la Commission Electorale Centrale le 14 septembre est consultable sur : http://www.vrk.lt/lt/naujienos/seimo-rinkimu-kandidatai-ir-kandidatu-sarasai.html

Dans les originalités, on remarquera l’habituelle liste de l’action polonaise (mais qui héberge aussi des Russes), le parti régional de Žemaitija, un parti défendant Drąsius Kedys (ce père qui avait assassiné un juge qu’il accusait de pédophilie sur sa fille, avant de décéder lui-même mystérieusement), un parti des retraités, et même un parti des gens (!). On notera que les leaders de deux des partis favoris, le Darbo Partija et Tvarka ir Teisingumas, trainent quelaues casseroles ; l’inégibilité de Rolandas Paksas a même été récemment confirmée. Enfin, si en 2008 quelques peoples du show-bizz ont fait leur entrée au Parlement, cette année il semble être plus porteur d’être sportif.

Suite aux dernières élections législatives, 10 partis politiques étaient représentés au Seimas, plus 4 individuels. Les conservateurs de Tėvynės Sąjunga avaient remporté le plus grand nombre de sièges (45) devant les sociaux-démocrates du Lietuvos Socialdemokratų Partija (25). On avait vu l’apparition d’une troisième « force » avec le Tautos prisikėlimo Partija (Parti du Redressement Populaire – 16 sièges), populiste libéral, parti qui a depuis éclaté.

Selon le sondage le plus récent que j’aie retrouvé (29 Août), les positions seraient actuellement les suivantes :
 # Darbo Partija (Parti du Travail – Viktor Uspaskich) – 12 %
# Lietuvos Socialdemokratų Partija  (Sociaux démocrates – Algirdas Butkevičius) – 11 %
# Tvarka ir Teisingumas (Ordre et Justice – Rolandas Paksas) – 10,4 %
# Tėvynės Sąjunga (Conservateurs – Andrius Kubilius, actuel Premier Ministre) – 9,5 %

de g. à dr. :  Viktor Uspaskich,  Rolandas Paksas,  Algirdas Butkevičius 

Quand on connaît la marge d’erreur habituelle inhérente aux sondages (2 à 3 %) et le fait que celui-ci ait été conduit en période de vacances, on constate que tout reste possible. En tout état de cause, tant que le système électoral actuel perdurera, il sera nécessaire de passer par une coalition de partis pour former une majorité gouvernementale, ce qui signifie compromis (voire compromission) « à la 4ème République française ».   

En même temps que les élections législatives se tiendra un référendum pour approuver, oui ou non, la construction d’une nouvelle centrale nucléaire à Ignalina. On y reviendra certainement.


vendredi 14 septembre 2012

14 Septembre 1812 : la Grande Armée entre dans Moscou



Suite à la bataille de Borodino / la Moskova (7 septembre 1812 – cf. http://gillesenlettonie.blogspot.fr/2012/09/7-septembre-1812-le-prince-bagration.html), les troupes russes se sont retirées vers l’est, suivies par les avant-gardes de Murat, et installées le 12 Septembre à Fili. C’est à la conférence de Fili, le 13 Septembre, que le Général Koutouzov, allant à l’encontre de ses jeunes généraux, prend la décision d’abandonner Moscou sans combattre.

La conférence de Fili

Le 14 Septembre, l’armée russe traverse Moscou en direction de Riazan, suivie de milliers de civils. L’armée française franchit la Moskova en trois points (Fili, Dorogomilovo et Luzhniki) pour converger vers le centre ville, à l’exception du Corps d’Armée de Murat qui suit la retraite de l’armée russe, prenant le Kremlin au passage dans l’après-midi. Conformément aux traditions de la guerre, Napoléon 1er escomptait que le Tsar Alexandre 1er lui demanderait la paix puisqu’il s’était emparé de sa capitale (si Saint-Pétersbourg était la capitale administrative de la Russie, Moscou en était la capitale spirituelle). Surpris de ne pas voir de délégation lui apporter les clés de la ville, il dut se rendre à l’évidence : celle-ci était aux deux tiers vide. L’Empereur entre à Moscou le 14 Septembre à 2 heures de l’après-midi. 
Moscou ! Moscou ! 
  
Les premiers incendies éclatèrent le 14 Septembre vers 5 heures du soir. Au début, ils furent mis sur le compte de la négligence des soldats. Mais, plus tard dans la soirée, et surtout le lendemain, les trois quarts de la ville brûlaient et des mèches étaient retrouvées, attestant de mises à feu volontaires dans des dizaines d’endroits. Le feu se développait rapidement, dans la mesure où la plupart des maisons étaient en bois. L’incendie ravagera la ville pendant quatre jours.


Il ne fait aujourd’hui plus de doute que cet incendie avait été préparé et allumé selon les ordres du gouverneur de la ville, le comte Fiodor Rostopchine. Le fait que toutes les pompes à incendies aient été détruites ou emmenées, et les stocks de nourriture pillés ou détruits, était significatif. De même, Rostopchine avait ouvert les portes des prisons, libérant 2 à 3 000 criminels à qui il avait dit : « Vous avez commis quelques crimes ; mais vous n'en êtes pas moins de vrais Moscovites, et vous expierez vos fautes en servant dignement votre patrie ».    

Le comte Fiodor Rostopchine

(Paradoxalement, devant la colère de ceux qui ont perdu leurs biens dans l’incendie, le comte est disgracié par le Tsar et il préfère s’exiler, d’abord en Pologne, puis en Allemagne, en Italie et enfin en France. Il fait venir sa famille à Paris et c’est là que sa fille Sophie rencontre Eugène de Ségur (1798 – 1869), laquelle deviendra après son mariage le 14 Juillet 1819 la célèbre romancière, auteur de littérature enfantine, comtesse de Ségur).

Napoléon dut même quitter le Kremlin menacé par les flammes le 16 septembre et se réinstaller en dehors de la ville, au château de Petrovsky. Il y reviendra le 18 Septembre, attendant toujours une demande de paix d’Alexandre. En 1911, les Russes estimèrent que 6 496 maisons privées sur 9 151 avaient été détruites, de même que 8 251 commerces. 12 000 corps avaient été retrouvés dans les décombres.  

  
La Grande Armée quittera Moscou le 18 Octobre, en direction de Kaluga (sud-ouest) où ils trouveraient de la nourriture et du fourrage, ces régions fertiles n’ayant pas été touchées par la guerre. Mais le 24 Octobre, le détachement d’avant-garde du prince Eugène de Beauharnais se heurte au Général Doctorov à Maloïaroslavets. Le village est pris et repris 6 fois. N’arrivant pas à établir une tête de pont solide, Napoléon (qui avait failli être capturé par les Cosaques) décide de rebrousser chemin et de reprendre la route de Mojaïsk, déjà empruntée à l’aller. Mais celle-ci avait été saccagée et était dépourvu de possibilités de ravitaillement. La catastrophique retraite de Russie commençait.

Deux siècles plus tard, assis dans son fauteuil, il est confortable de dire que Napoléon est resté trop longtemps à Vilnius ou à Moscou, qu’il aurait dû faire donner la garde à la Moskova, etc.…… Mais peu nombreux sont les chefs de guerre qui ont réussi à entrer à Moscou. Avant Napoléon, il faut remonter de deux siècles (1610 – 1612) pour trouver les forces de la République des Deux Nations (polonaise et lituanienne) s’installant dans la capitale russe, le jeune prince Ladislas Vasa étant même désigné comme Tsar. Même Hitler s’y est cassé les dents.

Cette campagne aura toutefois montré deux principes qui restent encore valables aujourd’hui : la logistique est dimensionnante et l’ennemi ne joue pas toujours le rôle qu’on voudrait lui voir jouer.