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lundi 11 avril 2011

Relations polono-lituaniennes : peut-on faire pire ? (2)


Au sortir de la période soviétique, il y avait une empathie certaine entre les Polonais et les Lituaniens, les premiers ayant semé la révolte dans les pays satellites avec « Solidarité », les second ayant fait de même avec « Sajūdis » dans les républiques soviétiques. Mais aujourd’hui, aux yeux des Polonais, les Lituaniens sont nationalistes, et à ceux des Lituaniens, les Polonais sont arrogants !

Rappelons qu’au retour à l’indépendance, le gouvernement lituanien a fait adopter une Loi sur la citoyenneté qui a permis à plus de 90 % des personnes d'origine ethnique non lituanienne d’opter pour la citoyenneté lituanienne. Dans les lignes qui vont suivre, par « Polonais » il faut donc entendre « citoyen lituanien de nationalité polonaise ». Rappelons également que l’article 14 de la Constitution du 25 Octobre 1992 stipule que « La langue officielle {de la République de Lituanie} est le lituanien ».

Car aujourd’hui, un des points bloquants des relations lituano-polonaises tourne autour des droits de la minorité polonaise en Lituanie, à savoir l’enseignement polonais en Lituanie, la transcription des noms des ressortissants de la minorité polonaise sur leurs papiers d’identité, ou encore la double utilisation du Polonais et du Lituanien pour les noms de rues dans les localités majoritairement polonaises. Les récriminations se focalisent sur la nouvelle loi sur l’éducation adoptée par le Seimas le 17 Mars 2011, loi qui impose que plus de matières soient enseignées en Lituanien dans les écoles polonaises de Lituanie. Les Polonais disent redouter qu’avec cette loi les jeunes Polonais soient lituanisés en l’espace d’une génération.

Les sommets de la passion ont été atteints quand il s’est agi de la lituanisation des noms polonais sur les passeports lituaniens, certaines lettres polonaises n’existant pas dans l’alphabet lituanien. Mais imagine-t-on qu’un tel amendement puisse être adopté, car il poserait ipso facto la question du cyrillique pour les citoyens lituaniens de nationalité russe et bélarusse.

Une des revendications phares est également l’inscription des noms des rues en polonais et en lituanien dans les zones à majorité polonaise. Certains vont même jusqu’à demander que les rues reprennent le nom qu’elles avaient entre 1920 et 1940, lorsque la région était occupée par l’armée polonaise du général Lucjan Żeligowski !

Le leader des Polonais de Lituanie, Waldemar Tomaszewski (ci-dessus), député européen, a en outre, récemment ajouté de l’huile sur le feu. Après avoir fait alliance avec un parti russophone pour les récentes élections municipales, il a proclamé le 6 Avril que les Polonais étaient arrivés les premiers dans la région de Vilnius et que c’était aux Lituaniens de s’intégrer à la minorité polonaise et pas le contraire ! Il est vrai qu’il est ardemment soutenu par le Ministre polonais des Affaires Etrangères polonais, Radoslaw Sikorski, qui s’est même permis une ingérence remarquée dans les affaires intérieures lituaniennes avant le vote de la loi sur l’éducation par le Seimas.

Mariusz Maszkiewicz, le premier Ambassadeur de Pologne après le retour de la Lituanie à son indépendance, voit dans ces bisbilles la main de Moscou. Il estime même que la région autour de Vilnius, peuplée majoritairement de polonophones et accessoirement de russophones, pourrait connaitre le sort de l’Abkhazie, de l’Ossétie du sud ou de la Transnistrie ! On n’en est certainement pas (encore) là. Toutefois, une mésentente entre la Lituanie et la Pologne ne peut qu’être profitable à la Russie.

Incidemment, on n’oubliera pas que 2011 est une année électorale en Pologne, avec des élections législatives qui se tiendront vraisemblablement le 23 Octobre. La Plateforme Civique (Platforma Obywatelska) du Premier Ministre Donald Tusk et du Ministre des AE Radoslaw Sikorski (ci-dessous) pourrait avoir la tentation de faire de la surenchère à usage électoral interne…… Il serait toutefois étonnant que les tensions, qui perdurent depuis …… 1385, disparaissent du jour au lendemain après ces élections.







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